Les pages d'histoire

du Trimestre

 

 

Le docteur Joseph Weill dans la tourmente de la guerre

«  Une bataille muette, tenace et inégale 1939 – 1945 »

Aude Grégoire    www.conferences-aude-gregoire.fr

                                                                                                                                            retour

             

   Le 1er septembre 1939, l’ordre d’évacuation de la ville de Strasbourg est donné. 180 000 habitants vont quitter leur foyer pour se diriger en grande partie vers la Dordogne.Le Dr Joseph Weill, médecin strasbourgeois, va aider cette population à quitter la ville. Il ne se doute pas alors qu’il ne reviendra à Strasbourg qu’en avril 1947. Son travail de résistance civile actif va alors commencer dans une région qui lui est inconnue.

 

1-Le Docteur Joseph Weill au service de la France (septembre 1939 – juin 1940)

Le Docteur Weill se met au service de l’armée française, service sanitaire d’abord à Terrasson (Dordogne) où il exerce son métier auprès de la population réfugiée. Il met en place une équipe volante de menuisiers pour aménager des logements décents à la population strasbourgeoise, et une équipe volante sanitaire pour consulter les différentes familles, relever les besoins, le nombre d’enfants en âge d’être scolarisés. Il introduira la médecine alsacienne dans une région qui ne connaissait pas la médecine moderne.

Sa belle sœur, Fanny Schwab organise l’aide aux réfugiés à Périgueux au côté de Laure Weill. Elles vont mettre en place l’Organisation d’Aide Sociale Israélite. En avril 1940, il est affecté à Angoulême, où il arrive à juguler une épidémie de typhoïde, à évacuer et brûler un camp de réfugiés insalubre. Grâce à une équipe de dames anglo – américaines, il renforce l’aide aux Mosellans réfugiés et aux internés.A l’arrivée des troupes allemandes, sur les conseils véhéments du préfet d’Angoulême, il se réfugie avec sa famille bien au sud de Terrasson ne sachant pas où la ligne de démarcation s’arrêtera. En fait, Terrasson restera en zone sud jusqu’en novembre 1942.

 

2-Le Docteur Joseph Weill au service de l’Œuvre de Secours aux Enfants

A partir de septembre 1940, il est coopté par Andrée Salomon auprès de l’Œuvre de Secours aux Enfants (OSE), et devient leur Directeur Médical. C’est une œuvre d’origine russe, créée en 1912 par des médecins venant au secours de populations juives victimes de pogroms. Le siège de l’OSE s’installe après quelques pérégrinations à Montpellier jusqu’en novembre 1942.

L’action du Dr Weill au sein de l’OSE de 1940 à août 1942 va se concentrer sur l’aide et le sauvetage des réfugiés juifs étrangers dans les camps d’internement, et en résidence surveillée, tout en respectant  les lois imposées par Vichy.La nécessité est de faire un travail social en profondeur et la priorité est donnée aux libérations. En effet, l’aide d’urgence apportée au sein des camps n’est en aucun cas une acceptation de l’existence de ces camps.

Pour intervenir dans les camps de manière efficace, le Comité de Nîmes, une association de 25 œuvres de bienfaisance religieuses et non religieuses, nationales et internationales voit le jour en novembre 1940. A sa tête Daniel Lowrie, président du YMCA en France. Sa première réunion a lieu à Nîmes en novembre 1940. La mobilisation de ces 25 œuvres est due à l’arrivée au camp de Gurs, de toute la population Juive du pays de Bade, de la Sarre et du Palatinat en octobre 1940. C’est la première et la seule déportation de Juifs allemands à l’ouest. Le camp en une nuit triple sa population (9 847 internés)

Le camp de Gurs (PA) se dote grâce à l’OSE et à l’aide financière du Joint d’internées volontaires telles que Ruth Lambert et Dora Werzberg.

A partir de janvier 1941, ces familles juives internées sont transférées au camp de Rivesaltes (Pyrénées Orientales). Les internés quittent la boue pour une terre aride et la tramontane. Les conditions de vie sont aussi difficiles qu’ u camp de Gurs même si les baraques sont en dur.

La maladie de la faim dans les camps se déclare en juin 1941. Cri d’alarme. Un programme de lutte contre les cachectiques est mis en place, mais n’est appliqué qu’en février 1942.

Pour accueillir les enfants sortis des camps dans des conditions de vie décentes, l’OSE a installé des homes d’enfants notamment dans la Creuse et en Haute Vienne avec un encadrement compétent. De nombreux cadres juifs, exclus de la vie active par les lois de Vichy, y trouvent un emploi. La Hicem s’occupera d’organiser l’émigration des enfants (300 enfants partiront entre 41 et 42) aux USA, ou en Palestine.

Parallèlement à l’aide apportée dans les camps d’internement, l’OSE va créer des centres médicaux dans les principales villes de la zone Sud (Lyon, Marseille, Nice, Toulouse, Montpellier, Périgueux etc….) à l’attention des populations réfugiées en zone Sud.

       

josephweil.jpg

  3-Le Docteur Joseph Weill au service de la vie – le tournant d’août 1942

Début 1942, les nazis ont mis au point la déportation des Juifs vers l’Est et leur extermination. Les transports ferroviaires sont prêts à partir de Drancy dès l’été 1942.

La zone sud avec ces camps d’internement représente pour Bousquet un réservoir de 10 000 Juifs à déporter.

La direction du camp de Rivesaltes demande aux œuvres début août 1942, de faire revenir les enfants des homes pour pouvoir déporter les familles entières au nom du regroupement familial. Andrée Salomon s’y oppose si vigoureusement, que les représentants des autres œuvres la soutiennent dans sa lutte. Sa résistance déterminée permettra de sauver ces enfants de la déportation.

A gauche, le Dr Weill avec Georges Loinger. (coll. Aude Grégoire

         

 

        En ce mois d’août 1942, le Dr Joseph Weill en compagnie de Lazare Gurvic, se rendent à Genève où ils vont annoncer de bien mauvaises nouvelles, la rafle du Vel d’Hiv, et des rumeurs de plus en plus inquiétantes sur l’extermination des Juifs à l’Est.

 

A son retour de Genève, le 27 août 1942, ses amis l’emmènent au camp de Vénissieux où sont regroupés environ 1016 Juifs raflés dans la région lyonnaise. Ils vont sauver sous le couvert de l’Amitié Chrétienne, donc de l’abbé Glasberg et du père Chaillet,  de la déportation 471 personnes dont 108 enfants. Ils défendent chaque cas auprès de la commission de criblage.

 

C’est à cette occasion que le docteur Joseph Weill rencontre Georges Garel, le beau frère de Charles Ledermann. C’est l’homme qu’il lui faut pour créer un réseau de sauvetage clandestin des enfants. Ce sera le fameux réseau Garel. En effet, il est convaincu que les homes d’enfants sont devenus des pièges mortels à la merci de la Gestapo et de Vichy. Disperser les enfants : leur donner une identité aryenne, les cacher dans des milieux non juifs et pour les plus religieux ou les plus typés les envoyer en Suisse ou plus tard en Espagne. Les passages clandestins en Suisse seront l’œuvre de Georges Loinger.

 

En mars 1943, la Gestapo se rend à son domicile à Terrasson où il ne le trouve pas. Il est temps de fuir en Suisse avec sa famille.Il arrive à Genève en avril 1943. Il s’occupe, alors,  à faire passer clandestinement l’argent du Joint en France pour continuer à financer  l’œuvre de sauvetage des enfants. Il  forme à Genève,  des infirmières, des assistantes sociales pour soigner après guerre « les personnes déplacées ».

 

Cet homme, que le Grand rabbin Liber qualifiait de « Jérémiant », que d’autres qualifiaient de « Prophète », ou encore de «  visionnaire pessimiste qui avait toujours raison », selon Serge Klarsfeld, a toujours su  prévenir le pire pour oser le meilleur !

 

 

 

 ESPACE MEMOIRE  

  7 rue du Docteur Viville  

 57300 HAGONDANGE

 03.87.72.08.6 

 

    

 retour

 

 

[Les Echos]][documentation][Expositions][Conférences][Liens]

Copyright(c) 2005 ASCOMEMO. Tous droits réservés.
roland.gautier2@libertysurf.fr