Les pages d'histoire

du Trimestre

 

 

Charles Bourrat, Préfet de la Moselle et des Mosellans

 

 

 Le 10 mars 1939, Charles Bourrat, né le 1er janvier 1884 à Sigean (Aude), est nommé préfet de la Moselle. Premier poste de préfet en 1928, il fut tour à tour en place dans les Basses-Pyrénnées, le Cher, la Côte d'Or et enfin Alger.

Il a à charge l'administration d 'un département frontalier avec le pays bélligérant. On le voit dans les villages évacués mettre en sécurité les biens abandonnés, régler les problèmes de réquisition, de ravitaillement, de laisser-passer, et tous les incidents liés à la concentration des troupes... Lorsque Metz est déclaré "ville ouverte", il reste le seule représentant de l'état encore en place.

                  

1939 : Visite de Camille Chantemps dans un village mosellan évacué avec le préfet Bourrat (à droite)           et le général Condé (Coll.J-C Bourrat)

 

1939 : Visite de Camille Chantemps dans un village mosellan évacué avec le préfet Bourrat (à droite)  et le général Condé

(Coll.J-C Bourrat)

Arrêté et expulsé par les Allemands.

 

Le 17 juin 1940, le drapeau allemand flotte sur la mairie de Metz. Le lendemain, Charles Bourrat est arrêté en même temps que le sous-préfet de Thionville, M Durocher. Interné, Charles Bourrat est expulsé le 8 août. La veille, le Gauleiter Joseph Bürckel était nommé Chef des Zivilverwaltung in Lothringen, chef de l'administration civile en Moselle.

 

Bourrat est reconduit à la frontière à Ars sur Moselle, sous escorte militaire, avec obligation de n'emporter que 200 francs, somme vérifiée au passage par la douane allemande. Il quitte la préfecture à 13h30 avec son collaborateur M. Durocher, sous-préfet de Thionville.

Ils ont été prévenus de leur expulsion la veille par le Dr Rech, Landrat d'Ottweiller (Sarre), faisant fonction de préfet de Moselle pour le compte du reich depuis le 25 juin. "A la frontière, après Novéant, nous sommes arrêtés par les douaniers et gendarmes allemands. Nos sauf-conduits et nos portefeuilles sont vérifiés. Tout est en règle. Nous franchissons la ligne.

Les officiers de douane nous saluent courtoisement".  Cinq jours plus tard, la Metzer-Zeitung indique en sixième page que "le dernier préfet de la Moselle a franchi la frontière".

 C'en est fini de la représentation de l'Etat français en Moselle.

 

Arrivé à Nancy vers 14h30, Charles Bourrat est immédiatement accueilli par M.Bosney, préfet de Meurthe et Moselle.

Après un séjour de 35 heures, il rejoint Vichy où les préfets de la Côte d'Or et de l'Allier lui offrent l'hospitalité." J'étais reçu par le ministre Adrien Marquet. L'accueil était très froid.

J'exposais au ministre la situation du département de la Moselle, les conditions de mon arrestation et de mon expulsion. J'eus le sentiment très net que mon récit, très objectif, et très fidèle d'évènements importants pour l'histoire n'eut aucun intérêt pour le ministre de l'Intérieur.

J'abrégeais l'audience à la stupéfaction du ministre, et je me retirais avec le sentiment d'une modification des sentiments du gouvernement à l'égard de l'Alsace-Lorraine".

 

Le dimanche 14 août, le préfet est reçu par le maréchal Pétain. Il lui expose la situation de la Moselle dont maréchal semble tout ignorer. Charles Bourrat décide à l'issue de cet entretien de ne plus continuer ses fonctions. Il se rend à Perpignan (Pyrénées Orientales)

 Préfet de la Moslele à Montauban.

18 janvier 1942 - Montauban : Comité Lorrain avec au centre le préfet Bourrat avec Liard, de Wendel, Sérot, Hocquart, ... (coll. J-C Bourrat)

 

 Le 17 septembre 1940, Charles Bourrat   est convoqué chez le nouveau ministre de l'intérieur Peyrouton. Il est informé de l'expulsion de 5 à 6 000 Mosellans depuis le 5 août et de celle de Mgr Heintz. Le ministre lui demande d'accepter la mission de pourvoir à leurs besoins en se rendant à Lyon.

"Les expulsés ne dépendaient que de moi et j' avais autorité sur toutes les administrations civiles et militaires pour obtenir que satisfaction leur soit accordée. J'organisais immédiatement mes services.

 

Je retrouvais le secrétaire en chef de la sous-préfecture de Thionville. La mise en ordre se faisait facilement. Tout d'abord, il fallait organiser la fiche d'état civil, pourvoir au ravitaillement, au logement. Les fonctionnaires des diverses administrations étaient rattachés provisoirement aux services administratifs du Rhône".

 

Le 6 ocotbre 1940, Charles Bourrat est convoqué à Vichy où le ministre de l'Intérieur lui indique que le gouvernement a décidé de le maintenir dans ses fonctions de préfet de la Moselle à titre symbolique. Il est chargé d'assurer l'administration des expulsés répartis dans les départements de zone libre.

 

Le 10 décembre 1940, il installe les services de la préfecture au 4 rue Lacapelle à Montauban (Tarn et Garonne) où Durocher, ancien sous-préfet de Thionville, est nommé préfet. Au 1er avril 1941, tout le personnel de la préfecture de Metz, replié ou expulsé est définitivement installé à Montauban. Autour de Charles Bourrat et d'Etienne Jung, ancien sous-préfet de Boulay, 27 employés sont réunis, soit avec femmes et enfants une petite communauté de 72 personnes. "Le gouvernement m'avait adressé les crédits nécessaires aux secours des expulsés et des réfugiés. J'avais autorité pour le reclassement. Des subventions et aides furent consenties largement aux agriculteurs désireux d'afermer des terres ou aux commerçants pour des gérances de magasins.

Il était décidé que tous les fonctionnaires alsaciens et lorrains recevraient les indemnités allouées avant-guerre". Le 1er février 1941, la préfecture publie son premier Bulletin pour les Réfugiés au contenu strictement administratif. Il n'a qu'une vie éphémère  et disparait le 15 avril 1941 après son sixième numéro. Le préfet accompagné de Robert Sérot, président du conseil général de la Moselle et député et de Mgr Heintz, va dans les communautés d'expulsés. Il organise aussi le grand rassemblement de 14 000 Mosellans à Lourdes en août 1941. Après l'occupation totale de la France, la situation se complique pour les Mosellans. Mais le préfet Charles Bourrat est reconduit dans ses fonctions le 5 janvier 1944 au-delà de la limite d'âge malgré uneopération à l'estomac.

 

 Le 9 juin 1944, il est arrêté par les Allemands et est déporté à Neuengamme puis à Tinek (Tchécoslovaquie). A son retour, ile se retirera à Perpignan où il est élu conseiller général. Il décède début septembre 1964.

 

Sources :

Charles Bourrat, l'Agonie de Metz, édition Le Lorrain 1947

Charles Bourrat, de Metz à Montauban, 1953  cahier de la SHAL Metz 198

 

 

 

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